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Le catalogue de la bibliothèque de Colón. - Arnamagnæa Institute de l’Université de Copenhague |
MONTPELLIER,
UNE DES CAPITALES DU
LIVRE AU PREMIER XVIe SIECLE
Fernando
Colomb (1488-1539), riche fils de Christophe, veut rassembler chez lui, à
Séville dans son hôtel de la Puerta Goles, aux bords du Guadalquivir,
todos los libros de todas las lengas, tout ce qui a été imprimé
aussi bien dans la Cristianidad que fuera della.
Ce sera
la Biblioteca Fernandina, rebaptisée Colombina. Une bibliothèque universelle
(et il sait par ses voyages aux Nouvelles Indes que le monde est vaste). Mais il sait, comme il l’écrit à Charles
Quint en 1537 que le temps est un insatiable rongeur : muchos est aya
perdida : déjà !
Ce
n’est pas qu’il veuille tout lire, loin de là. Il a sur le livre une théorie
des plus intéressantes :
Si
les livres étaient faits pour être lus, on n’en imprimerait pas plus dans
l’espace d’un pays que ceux qu’une personne en toute sa vie pourrait lire, ou,
compte tenu de la variété des goûts et des esprits, pas plus que le nombre de
livres qui pourraient être lus en cinquante ans par quatre personnes, ce qui
donne un bon chiffre, étant celui des continents et celui des évangiles…
Il
enfonce le clou en énonçant ce qui est pour nous un sacrilège :
Ma bibliothèque n’est pas destinée à
l’étude, mais à la sauvegarde de tous les livres et à l’augmentation des quatre
tables [ses catalogues].
Et encore, pré-mallarméen un peu :
« Le monde, comme l’ensemble de la
médecine et toute la science.. devrait tenir en un seul livre, devant être
résumé à l’intérieur d’un in-12 ».
Je
me suis attardé sur ces citations pour faire un peu voir l’homme :
méticuleux à l’extrême, adepte des plus vastes projets (découvrir et
répertorier la mer immense des imprimés), collecteur indifférent de la
diversité humaine…
Il
commence tôt. A 21 ans, en 1509, il possède 238 livres dans son coffre de Saint-Domingue.
A
sa mort, il en aura 15 381 dûment répertoriés, et il en aura perdu 2000 dans un
naufrage entre Gênes et Séville. Il aura aussi 3 200 gravures. Pic de la Mirandole et Erasme ne posséderont
respectivement pas plus de 1190 et 413 livres.
Plus tard, Montaigne arrivera à 1000, mais c’est plus tard, et c’est
Montaigne.
Son
génie est de s’intéresser aussi aux petits, aux obscurs, aux sans-grades.
C’est-à-dire aux brochures, aux almanachs bizarres et aux bleus, c’est-à-dire à
cette bibliothèque bleue qui colporte les romans de chevalerie, les faits
divers et les ragots sur les routes du petit peuple. Tout bon bibliothécaire
sait que, si les in-folios se conservent, les feuilles volantes s’envolent ou disparaissent
dans des tâches domestiques inattendues mais fatales : éponger les
liquides renversés, emballer du poisson ou obturer les pots de confiture. Quand
ce n’est pas dans de rabelaisiens torche-culs (Rabelais est à Montpellier en
même temps que Fernando).
Fernando non
seulement les recueille, mais fait une vibrante apologie de ces
obrillas et obrezillas, ces menus
ouvrages : il enjoint à ses héritiers « que se tenga cuydado de comprar las obrezillas pequenas de qualquer
qualidad que sea [comme] coplas, refranes, e otras cosillas que también se an
de tener en la libreria :
tout acheter, sans se soucier de l’épaisseur, de la qualité d’impression ou du contenu. Tout ce qui un jour ou l’autre a pu se vendre en librairie doit finir dans sa bibliothèque.
Plus
tard, au XIXe, à Montpellier, Charles de Vallat fera de même et léguera à sa
ville un immense trésor de petites choses. Charles de Vallat avait été ministre
plénipotentiaire en Espagne.
FERNANDO COLOMB À MONTPELLIER (juin-juillet 1535).
TYPOLOGIE DES LIBRAIRES
Montpellier,
justement, Fernando y vient en 1535. Au début des années ’30, il a 40 ans. Il
se lasse de découvrir sans cesse de nouvelles Amériques. Il laisse ça à son
frère. Lui va sillonner l’Europe. Pas les villes d’Europe, non, les librairies
d’Europe. De Rome à Anvers en passant par Paris, Lyon, et Montpellier.
Il va
lentement. Il rencontre Erasme qui lui offre son Antibarbarum avant que l’encre en ait fini de sécher. Il rencontre
beaucoup de monde. De ces rencontres, nous ne connaitrons jamais que les
donateurs de livres.
Partout il
achète. A des rythmes différents. Parfois, il se contente de grappiller. En
1514, il achète un seul livre à Narbonne : il avait la tête ailleurs, il
allait à Rome. De Narbonne à Rome, il a dû forcément passer par Montpellier. Il a peut-être repéré les libraires mais n’a rien acheté. C’est que Fernando
travaille avec ordre et méthode : Montpellier n’étant pas une étape
prévue, il ne s’arrête pas à Montpellier. Mais il prend date : il
reviendra. 20 ans après.
Et cette
fois, il reste 6 semaines, de mi-juin à fin juillet 1535.
Il achète
en masse.
Sur la
dernière page de chaque livre acheté, il note les circonstances de
l’achat : la ville, le prix (et le taux de change), la date d’achat, et
éventuellement, la reliure.
Mais jamais
le nom du libraire !
- Quoi ? Pas de nom de libraire ?
- Non, pas de nom de libraire. Juste la ville, la date et le prix.
- C’est frustrant.
- Oui, ma petite étude vient de cette grande frustration.
L’examen minutieux des 112 livres achetés par Fernando Colomb à Montpellier et qui
subsistent sur les étagères de la Colombina va nous permettre d’affiner notre connaissance du lectorat et
donc des libraires à Montpellier au premier tiers du XVIe siècle.
Cette
étude se base sur l’excellent catalogue informatisé de la Bibliothèque
Colombine de Séville.
J’en ai
extrait toutes les notices contenant le mot « Montpellier ».
Pour ces
livres, nous possédons le lieu, la date précise et le prix d’achat.
LES ACHATS DE COLOMB À MONTPELLIER
Tout
d’abord, il faut signaler que ce corpus n’est en aucun cas significatif des
achats de Fernando Colomb à Montpellier. Par d’autres sources, Klaus Wagner
estime à 750 le nombre d’ouvrages qu’il y a acquis. Il ne
contient donc que 15% de ces achats, et d’emblée nous constatons des
distorsions majeures avec cet ensemble. Par exemple, aucun livre ne porte
l’adresse de Venise.
Au
contraire, ils sont quasiment tous imprimés en France (contre 42% seulement
pour l’ensemble). Il semble que tous les livres n’aient pas été égaux face aux
facteurs de disparition, et que l’œuvre du temps, pour une raison inconnue ait
été fortement sélective.
Aussi ce
corpus des livres rescapés n’est pas une source fiable pour l’étude des achats
de Fernando Colomb : ces informations nous seront fournies dans les relevés de Klaus Wagner.
Mais il
semble capable de nous renseigner sur les librairies ou autres lieux de vente
de livres, ainsi que sur certains comportements du lectorat à Montpellier à
cette époque.
Avançons,
nous verrons bien.
Méthodologie :
Un
postulat simple a guidé mon travail. Sur les 40 jours passés à Montpellier, Fernando
Colomb en a consacré au moins 13 à ses achats. Les autres jours, il a sans doute annoté
ses livres, les a enregistrés sur son Indice
general alfabetico, et les a peut-être un peu lus, il a sans doute aussi vaqué à d’autres
occupations.
Mon postulat est le suivant : les livres
achetés le même jour l’ont été dans une même librairie.
Colomb sort de son auberge, va chez un
libraire, passe sa journée à explorer les étagères, fait une pile de livres, et
se les fait livrer chez lui. De temps à autre, il digère ses prises, cesse ses
achats, avant d’explorer une autre boutique.
DESCRIPTION
DES LIVRES RESCAPÉS :
Sur les 112 titres extraits du catalogue informatisé, 54 viennent de Lyon, 45 de Paris,
8 de Rouen, Bâle, Poitiers, Grenoble, Toulouse, Cologne, Avignon (un titre
chacun).
Les prix sont indiqués
soit en sous (12 d.) soit en deniers. J'ai tout converti en deniers.
Les achats se
font tous les jours, même le dimanche.
Je n’ai pris en
compte que les journées d’achat dont subsistent plus de six livres.
ANALYSE JOUR PAR JOUR DES ACHATS :
Jeudi
27 juin 1535
9 ouvrages (N° 23, 24, 35, 43, 47, 49, 63, 64, 103
)
Prix :
541,5 deniers au total, soit 60 d. le titre.
La présence de deux in-folios, Gui de Chauliac, 324 folios pour 200 deniers (n° 43) et un Vieux
testament en figures 336 f° pour 210 d. (n°64)
augmente le prix moyen, mais 4 autres ouvrages atteignent ou dépassent les 30
d. C’est un prix moyen très considérable.
Contenu :
Il y a en plus du Gui de Chauliac et de la
Bible illustrée :
Philippe de Commines (n°24), Homère (n°47), Le
pénitencier de Jean Clerc (n° 23), 2 œuvres littéraires (Florent et Lyon (n°35) et la Mélusine de Jean d'Arras (n° 49)), un livre de spiritualité (n°63) et
une vie de sainte Barbe (n°103).
Tous ces livres sont en français.
Origine et date :
Paris Girault
1533
Paris Galliot du Pré 1525
Paris Janot 1534 (Chauliac)
Paris Michel le Noir 1520
Paris Le Dru Jehan Petit 1508
Lyon
Arnoullet 1532 et 1528
Lyon Fr Juste 1534
Lyon Chaussard 1527
Conclusion :
Il semble que nous soyons dans une boutique
ayant pignon sur rue, qui se fournit surtout à Paris, chez les meilleurs
éditeurs. On y vend des livres de grande valeur tant pécuniaire qu’intellectuelle.
C'est une des premières où va Fernando Colomb
(qui commence ses achats les 21 et 24 juin) : sans doute la plus renommée,
celle où se fournissent les professeurs (médecine ou théologie) et notables, mais
qui débite aussi des œuvres littéraires reconnues.
Mercredi
3 juillet
14 ouvrages (N° 3, 12, 17, 19, 20, 39, 42, 58, 65, 71, 72, 78,
86, 93)
Prix :
351 deniers, soit 25 d. le titre.
Il s'agit de volumes conséquents : 13
dépassent les 50 folios, 7 les 100 f°, 3 les 200 f°
Contenu :
4 concernent la médecine ou la pharmacie. A
noter un Galien en Grec à l’usage de la Sorbonne (n°39).
4 concernent la littérature ou l'art oratoire
ou poétique (Art poétique n° 78, Traité de l’orateur n°17).
Les 4 volumes spécifiquement religieux sont
des valeurs sures : Internelle
consolation (n°58) ou des commentaires bibliques (n°71), sermons ou
liturgie.
Une généalogie du Grand Turc (n°93) donne la
note historique.
Sur les 14 titres, 9 sont en latin, et un en
grec.
Origine et date :
7 viennent de Paris
5 de Lyon (dont 3 de Sébastien Gryphe)
1 de Bâle et 1 de Cologne.
Ce sont des livres récents. Le plus ancien a
15 ans, 4 sont imprimés depuis 1 an, et 7 au moins depuis moins de 5 ans (2
sans date).
Conclusion :
Nous avons là un ensemble sérieux. Il s’agit
de livres destinés à des professeurs ou des enseignants, médecine,
belles-lettres ou théologie, qui s'intéressent à des parutions récentes.
L’usage fortement majoritaire du latin (voire du grec) cible une clientèle
universitaire, incluant des étudiants étrangers.
En fait, on ne voit pas dans cette liste de
livre « de loisir » : tout y sent l’étude et l’enseignement.
Samedi
6 juillet
14 titres (N° 6, 26, 27, 30, 48, 52, 61, 76, 81, 85, 91, 92,
98, 100)
Prix :
313 deniers soit 22 d. l'ouvrage.
Mais 10 de ces ouvrages ont moins de 32 folios
(8 en ont même moins de 16). Ce sont surtout des brochures : 10 ouvrages
coûtent moins de 4 deniers. Seuls, deux volumes sont de vrais livres, mais ils
posent quelques petits problèmes (voir ci-dessous).
Contenu :
Un
incunable de 1497, in-quarto de 442 folios (Doctrinale
pro eruditione puerorum de Villedieu, n° 6) acheté pour 6 s. (72 deniers),
retient l’attention. C'est un des rares ouvrages achetés "assi enquadernado", c'est-à-dire déjà relié (cuir sur
carton [et non bois comme on pourrait s'y attendre] avec lacets de fermeture). Il est possible sinon probable qu'il s'agisse
d'un ouvrage d'occasion, en 2e ou 3e main.
Il en est
de même pour L'Arithmétique d'Étienne
de La Roche, de 1520 (n° 52) dont les 230 folios in-4° coûtent, avec leur modeste reliure en parchemin, 17 s. soit 204 d.
Si
l’hypothèse de livres d’occasion déjà reliés est retenue, elle indique que les
livres ne se dévalorisent que modérément en changeant de main. Nos deux
exemples sont des livres scolaires devenus inutiles à des étudiants ou des fils
de famille ayant achevé leurs études.
Les autres
achats se répartissent en :
Feuilles
de circonstances ou d’histoire populaire : complainte sur une exécution capitale
(n°26), Mort de Marguerite d'Angoulême (n°61), Vie de Louis XI (n° 91, 58 folios), ou de Louise de Savoie (n°100)
qui sont morts récemment.
Pièces de
morale ou piété : Chevalier gris (n°30),
Songe de la pucelle (n°92), Verger céleste (n°98), Jardin du paradis (n°48), Quinze joies de Notre-Dame (n°81), etc...
13 des 14
titres sont en français. Le seul écrit latin est “Doctrinale pro erudition puerorum”, en édition incunable.
Origine et
date :
8 viennent de Lyon, 4 de Paris, 2 sont sans
adresse.
Ils datent
souvent des années 1520, l'un d'eux des années 30, et un est un incunable de
1497
Conclusion :
Dans quel type de librairie sommes-nous? On imagine bien une
clientèle de bourgeois, petits bourgeois ou commerçants acheteuse de courtes
biographies de (presque) contemporains (l’ancêtre d’une presse people?), des romans, des livres de
piété faisant un peu rêver (Verger céleste,
Jardin du Paradis, Songe de la Pucelle…), et quelques manuels pour
l’éducation des enfants. Un manuel d’arithmétique a toute sa place chez un commerçant
soucieux d’éduquer ses héritiers.
Dimanche
7 juillet
9 volumes (N° 2, 4, 13, 16, 22, 57, 84, 87, 96).
Prix :
510 d., soit 56 d. l'ouvrage.
Il y a là de gros volumes de commentaires de
l'écriture (222 folios sur les Psaumes (n° 4) et 230 f° sur les Épitres de
Saint-Paul, n°87), et des volumes plus réduits (de 16 à 64 f°) touchant plus à
l'actualité ou à une morale pratique.
Contenu :
Nous avons là un corpus très homogène. Tous
les livres ont un sujet religieux. Commentaires de l'Écriture (n°4, 87..), sermons
(n°13), apologie de l’ordre de Citeaux (n°22), ou conseils moraux pour trouver
la paix en Jésus-Christ (n°57) et ne pas perdre son temps ici-bas. Un titre, qui
exhorte les rois chrétiens à la paix (n°96) aurait pu être classé
"histoire", si la condition de cette paix n'était leur union sacrée contre
les infidèles. Deux ouvrages s'engagent
fermement du côté de l'orthodoxie catholique. L'un sur la continence (et le
célibat?) des prêtres (n°16), l'autre, publié à Anvers en 1523, défend explicitement
les sacrements contre Luther dont les thèses datent de 1517 (n°84).
6 titres sont en latin, 3 en français.
Origine et
date :
4 viennent de Lyon
4 de Paris
1 d'Anvers.
Il s'agit de livres récents, l'un d'eux est
même de 1535, 7 d'entre eux ont moins de 15 ans (l'un est sans date).
Conclusion :
Nous avons donc là un ensemble très religieux,
très catholique, et on pense à une librairie fréquentée surtout par des
ecclésiastiques assez fortunés, des chanoines par exemple, d'autant qu'elle est
ouverte le dimanche, profitant de l'affluence aux offices des chanoines venus
de Maguelonne. On y achète plus de latin que de français. On l'imagine à proximité de la future (mais
déjà désignée) cathédrale (le transfert de l’évêché se fera l’année suivante).
Lundi 8
juillet
6 volumes (N° 36, 37, 41, 50,
70, 79).
Prix :
Coût total : 91 d., soit 15 d. le volume.
Ce sont des livres de moyenne importance, de 20
à 131 f°, mais à prix modéré.
Contenu :
Le contenu est homogène, si on excepte un Protocole des notaires (n°79). Il s'agit de livres d'édification, ou d'exempla. Par exemple, Le Jugement d'amour (n° 36, qui fait référence à la fille du roi d'Ecosse Isabelle), ou Le Château d'amour de Pierre Gringoire (n° 41), ou encore l'édifiante mort d'un carme de Lyon (n° 50). On pourrait résumer le tout dans ce
Parangon des nouvelles honnestes et délectables, à tous ceux qui désirent veoir et ouyr choses nouvelles et récréatives sous umbre et couleur de joyeuseté : Utiles et profitables à ung chescum vray amateur des bons propos et plaisans passetemps (n° 70)...
Bref, des livres assez minces, de lecture aisée, et dont le tirage relativement élevé permet de les vendre à bon marché.
Les deux tiers sont en français, le reste en
latin.
Origine et
date :
Ils sont récents, 4 étant des années 1530, le
plus ancien datant de 1518.
4 viennent de Lyon,
1 de Toulouse
1 indéterminé.
Conclusion :
Des livres pour une clientèle d'artisans,
commerçants, voire tabellions et notaires à la fois croyants et humains
pratiquant une religion honnête et plaisante, loin des polémiques. Le latin, à
dose modérée, ne rebute pas, mais le français reste la langue lue et parlée de
préférence. Je me plais à penser qu’ils se retrouveront, eux ou leurs enfants,
quelques décennies plus tard, dans le parti des escambarlats,
ceux qui, ayant un pied dans chaque camp, refuseront aussi bien les fureurs de la
Ligue que celles des Réformés.
Note : un autre lot pourrait être rattaché à ce
libraire. En effet, les deux tomes d’une paraphrase de Justinien (n° 18) ont
été achetés, le premier le 21 juin, le second ce 8 juillet. Si on pense (mais
c’est loin d’être une certitude) que les deux tomes proviennent du même
vendeur, alors, les 3 autres achats du 21 juin pourraient compléter ce lot. Il
s’agit de deux brochures récentes de 16 et 20 folios de médecine populaire (n°
10 et 94), ce qui est en accord avec les achats du 8 juillet, mais aussi d’un
texte de Guillaume Durand, évêque de Mende au début du XIVe siècle, prônant le
mariage des prêtres, et s’opposant à la fois aux fêtes religieuses, à la
vénalité des sacrements et au pouvoir du Pape (n° 32). Ce petit livre latin de
74 pages édité à Lyon en 1531 semble d’ailleurs beaucoup plus la manifestation
d’un certain anticléricalisme populaire qu’un des premiers frémissements de la
Réforme. Plus proche de l’abbaye de Thélème que de la Genève calviniste.
Mardi 9
juillet :
16 ouvrages (N° 5, 33, 67, 68, 77, 89, 97, 101, 102, 104, 105,
106, 107, 108, 109, 110)
Prix :
16 ouvrages achetés pour 36 deniers en tout, soit 2,25
d. l'ouvrage : 12 d’entre eux coûtent 1, 1,5 ou 2 deniers, une misère. Le
plus cher, un Grand Albert minuscule (n° 5) de 48 folios de format in-16° (12
cm) en coûte 9. Il est vrai que c’est le livre le plus « épais »,
aucun autre ne dépassant les 16 folios.
Ces misérables brochures ont été l’objet de
deux miracles : d’avoir été achetées par Don Fernando, puis d’avoir été
conservées par la bibliothèque colombine. Il est vrai que ce n’est pas le type
d’ouvrage qui fait rêver les voleurs, et que les rats ne s’y attaquent qu’en
dernière extrémité.
Contenu :
Il ne s’agit donc que de (très) modestes
brochures.
9 sont des vies de saint : Madeleine
(n°101), Catherine (n° 104), Cosme et Damien (n°105), Sébastien (n° 106),
Marthe (n°107), Antoine (n°108), Roch (n° 109) et Marguerite (n° 110). Cosme et
Damien et Roch sont des saints liés à Montpellier.
3 sont des petits livres de piété : Jardin de l’âme
dévote (n°77), Ventes d’amour (n° 101), Marguerite des vertus (n°89) qui n’a
que 12 folios à effeuiller.
1 Albert le Grand sur les herbes, les pierres
et les bêtes.
1 Pater Noster expliqué en 8 folios (N° 68, ce
qui se conçoit bien s’énonce brièvement ?).
1 s’attaque aux usuriers en 4 f° (n° 33)
1 Couronnement de roi (N° 97, en
Hongrie !)
Tous sont en français.
Origine et
date :
Ils datent tous des années 1520-1535.
9 proviennent de chez Chaussard, à Lyon.
5 d’autres imprimeurs lyonnais.
Le Grand Albert est un livre de colportage
imprimé à Rouen en 1520.
1 volume n’a pas d’adresse.
Conclusion :
Une boutique de librairie ou de mercerie,
fournissant des poignées de brochures aux colporteurs sillonnant les villages
de l’arrière-pays et au petit peuple de Montpellier. C’est ici que Colomb met
totalement en pratique son impératif catégorique qu’il impose à ses exécuteurs
testamentaires : comprar
las obrezillas pequenas de qualquer qualidad que sea. Que Dieu
bénisse ces collecteurs d’art modeste !
Vendredi
12 juillet :
16 ouvrages (N° 1, 7, 11, 14, 21, 25, 28, 29, 34, 40, 44, 46,
53, 54, 56, 82)
Prix :
16 titres pour 727 deniers, soit 45 d.
l'ouvrage, ce qui est assez considérable. Surtout si on tient compte que 5 volumes
seulement dépassent les 100 folios, mais qu’un Boccace (n° 11) d'à peine 28 f° se vend 10 sols (120 deniers), presque aussi cher qu’un Grand coutumier de France (n°1) de 190
folios.
On se dit que certains livres de cette
boutique suscitent le désir inhérent aux choses rares et précieuses, voire un peu
cachées.
Contenu :
Le contenu est assez sérieux. Des vies de saints
érudites : Saint Christophe en 4 parties (n°21), et Saint Jérôme en 370 f°
(n°53) alors que les vies de saints achetées le 9 juillet n'ont que 4 ou 8f°.
Mais notons que c’est la « vie » de Saint Jérôme et non ses
« œuvres » qui est proposée à la vente, l’agréable hagiographie étant préférée à la théologie sévère.
On trouve ici du droit canon : Concile de Sens
(n° 25), ou Pouvoir des papes (n° 7, de 1526), et des livres de piété pour les
gens du monde, avec une cible féminine privilégiée : Femme séculière (n°28),
Filles pénitentes (n°34), Giroflier des dames (n°40), Femme forte (n°54),
Miroir des princes (n°82) ou autre Fagot de myrrhe (n° 29)...
Quelques livres profanes : Boccace, une Généalogie
de Clotaire (n° 14), ou un recueil d’anecdotes historiques (n° 56) ou Le roman
de Gérard de Nevers (n°46).
13 sur 16 sont en français
Origine et
date :
Ces livres sont tous postérieurs à 1514 (à la
réserve de 4 non datés)
12 viennent de Paris, 2 de Lyon, 1 de
Poitiers, 1 de Grenoble.
Il s'agit d'un libraire qui se fournit presque
exclusivement à Paris (ceux de Grenoble et Poitiers transitent sans doute par
un grossiste parisien)… Son enseigne
pourrait être : À la mode de Paris, sorte de préfiguration de la
librairie-papèterie que François Dezeuze, L’Escoutaïre, baptise à la fin du XIXe :
A la ville d’Angoulème.
Conclusion :
Cette librairie attire une clientèle assez
fortunée, érudite, mais friande de littérature de loisir moderne, bref, la
bonne société bourgeoise et chrétienne de Montpellier. Avec une fréquentation où
on devine une certaine mixité homme / femme. Les dames patronnesses, charitablement responsables de la vertu des jeunes filles, sont là, bien
présentes, avides de manuels de vertu, d’exemples, voire, pour leur information
personnelle, de contre-exemples.
Dimanche
14 juillet
13 ouvrages (n° 8, 15, 31, 59, 60, 62, 75, 80, 83, 90, 99,
111, 112)
Prix :
13 livres achetés pour 350 deniers, soit 27 d. le
titre, mais cette moyenne est relevée par deux volumes, un recueil de sermons
de Guillaume Pépin (n° 75) et les Œuvres de Virgile (n° 112) coûtant 8 et 9
sous. Les autres titres sont de moindre importance.
Contenu :
3 livres appartiennent à la littérature latine dont un Virgile
(n°112) et le Violier des histoires romaines (n° 111).
10 livres ont des thèmes religieux. Ce sont
surtout des livres de piété et d’oraison : Sapience du salut (n°31), Parfaite
oraison (n°59) ou Reffection
spirituelle de l’âme dévote (n°83), des Evangiles ou Psaumes commentés ou
une vie de saint (Pierre de Luxembourg, n°90).
C’est dans cette catégorie des guides
spirituels qu’il faut bien sûr classer l’étonnant et méticuleux inventaire pour
les quarante jours de carême :
Le quadragesimal spirituel Cest assauoir la
salade, les febves frites, les pois passez, la puree, la lamproye, le safren,
les orenges, la violette de Mars, les pruneaulx, les figues, les amandes, le
miel, le pain, les eschauldez, le vin blanc et rouge, l’ypocras, les invitez au
diner, les cuisiniers, les serviteurs à table, les chambrières servant de
blanches napes, serviettes potz et vaisselle, les graces apres diner, le lut ou
harpe, la dragée, pasque flories et les grandes pasques... Puis en fin le
double des lettres du sainct esprit enuoiees aux dames de Paris, veufues,
ieunes, religieuses, filles et pucelles, touchant les voiaiges de pasques, cest
assauoir sainct saulueur, argenteil, nostre dame des vertus, et montmartre : La
salade de Karesme. (n° 80)
9 titres sont en français (dont 3 traductions) et 4 en
latin.
Origine et
dates :
Tous (sauf 3 sans date) sont postérieurs à
1525.
7 portent une adresse parisienne, 5 viennent
de Lyon, un d’Avignon.
Conclusion :
Nous avons ici une piété assez érudite, avec traductions
et commentaires de l’Ecriture, et des recueils d’oraisons ou de sermons. Une
inquiétude religieuse conduit à chercher son salut en usant de méthodes si
précises et détaillées qu’on ferait volontiers de la recherche du salut une
science exacte. Ce qui n’occulte pas un certain relent d’humanisme, avec un
intérêt certain pour l’antiquité romaine.
Ce 14 juillet est, dans notre pointage des
livres rescapés, le dernier jour d’achat, ou presque, puisqu’un volume,
un livre de jurisprudence d’un sou (n°9), est acheté le 31 juillet, comme pour donner
une borne précise, un terminus au séjour de Fernando Colomb à Montpellier. Début
août, ses achats commencent à Lyon.
CONCLUSION de cette étude des 112 volumes subsistants :
PROFILAGE DES LIBRAIRIES MONTPELLIÉRAINES
ET DE LEUR CLIENTÈLE
Cette étude était une expérience qui pouvait
échouer lamentablement.
D'une part, l'échantillon de 112 volumes rescapés est un peu léger face aux 750 volumes effectivement achetés (15%).
D'autre part, le postulat qu’une journée d’achat correspondait à une
seule librairie possédant un type de livres et une clientèle caractérisée
pouvait s’effondrer.
Ce n’est pas vraiment le cas. Pour Fernando
Colomb, les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Chaque lot de livre enregistrés à une même date a ses caractéristiques propres, sa personnalité, qui doit être celle de ses lecteurs, fréquentant plutôt une librairie qui leur ressemble.
Ses premiers pas ont été faits au hasard dans
une ville inconnue.
Mais dès le 27 juin, nous le trouvons dans ce
qui pourrait bien être la « bonne » librairie de Montpellier, la plus renommée grâce à son fonds varié : on y trouve les meilleurs
livres de médecine, de droit, de théologie, mais aussi les fleurons de la
littérature française et latine. C’est le rendez-vous des notables, et plus spécialement de
l’élite laïque de la ville.
Le 3 juillet, il entre dans une librairie
qu’on pourrait qualifier d’universitaire. C’est à peine si on remarque ce
noble hidalgo, tant la clientèle est cosmopolite. Les étudiants étrangers de
première année, comme les frères Platter, y parlent latin par nécessité :
ils n’ont eu le temps d’apprendre ni le français ni l’occitan. Les 2e et 3e années et leurs professeurs le parlent peut-être aussi, mais par une sorte de pédantisme. Mais ce n'est pas du savoir que vient chercher Fernando, ce sont des livres.
Quelques jours plus tard, le 7 juillet, dans
une autre boutique, qui ressemble à ce que nous appellerions une librairie pour ecclésiastiques, Fernando
s’entretient, toujours en latin avec un chanoine sur les idées nouvelles et donc
dangereuses. Ce Luther est-il un agité, un charlatan, ou va-t-il changer la face du monde? Peut-être songe-t-il que sa vie est décidément liée aux nouveaux
mondes : cette Amérique, cet océan de livres nés dans la galaxie Gutenberg
et ces nouvelles idées humanistes qui ouvrent des portes inconnues. Dit-il à son chanoine qu’il est le
fils de Christophe Colomb? Qu’il veut, bons ou mauvais, tous les livres, et
qu’Erasme est son ami ? On dit tout, dans les librairies.
La veille, le 6 juillet, il avait exploré une librairie destinée à un plus
grand public. Ce bon public qui lit pour se délasser de la
gestion domestique, ou tout simplement sortir de la fastidieuse gestion de la petite ou moyenne entreprise familiale. Ce sont là gens qui élèvent leurs enfants
dans des bons principes et leur fournissent grâce à des manuels scolaires les bases de leur futur métier
(celui de leur père). Mais le sérieux des affaires n’empêche pas quelques
délassements. Et la pratique assidue de la religion ne bascule jamais
dans l’austérité ou la terreur d’une prédestination ratée par manque de grâce.
Pour ces gens en pleine ascension sociale, le grand monde ici-bas et le paradis là-haut sont
des vertes prairies qu’on peut rêver d’atteindre un jour.
Changement total, le 9 juillet lui fournit des
brochures et ce grand seigneur doit faire tâche dans une boutique où les
« canards » du jour, pendus à des ficelles comme la
littérature de cordel au Brésil ou les revues dans les kiosques actuels, voisinent
avec la mercerie, les chandelles ou les harengs salés. Il y côtoie des
servantes, des ménagères et des petits artisans qui savent un peu lire et qui
commenteront dans leur boutique, pour ceux qui ne savent pas, la vie des grands de ce monde et de l’autre.
Ambiance assez proche, le 8 juillet, dans
cette boutique fréquentée par d’honnêtes bons vivants, des Colas Breugnon qui aiment bien boire un coup en discutant avec Rabelais place de la
Canourgue sans savoir qu’il écrit des livres. Et qui, face à ce Grand
d’Espagne, se disent que c’est bien beau l’Amérique, mais que finalement, les
hommes sont partout les mêmes, et qu'on est bien chez le roi, mais qu'on est mieux chez soi. Don Fernando, venez donc au mazet dimanche, on reparlera de la vie en mangeant quelques escargots et on fera descendre le tout avec les dernières bouteilles de l'ancienne récolte.
Le 12 juillet, nous le rencontrons dans un
lieu bien différent. Une sorte de librairie pour associations puritaines. Les dames qui le fréquentent, car il y a beaucoup de dames
ici, ne s’occupent ni de théologie ni de politique : la vertu, la morale
et les bonnes mœurs les préoccupent davantage. Et Dieu sait qu’il y a à faire à
ce propos dans cette ville remplie d’étudiants venus de partout, et de
grisettes (comment s’appelaient les grisettes au XVIe siècle ?) au cœur tendre.
Ces dames (et ces messieurs, bien sûr quand même) achètent ici des vies
exemplaires, des modèles et des méthodes pour franchir victorieusement les
périls de la vie féminine. Fernando Colomb les achète aussi.
Le 14 juillet est le dernier jour d’achat
sérieux dans une librairie sérieuse. On ne se soucie pas encore de prendre la
Bastille. On ne se soucie sans doute même pas encore de renverser les dogmes.
Au contraire, une certaine inquiétude lancinante incite à les connaître, à les
détailler, à les pratiquer à la lettre, ces dogmes. Ce serait balot si, ayant
bien réussi sa vie, on allait rater l’autre vie, l’éternelle, pour des
questions de procédure. Alors, on fréquente les sermons qui disent quoi faire.
On lit les livres qui disent quoi faire. Un code clair et précis nous dit quand
on doit manger la purée de pois cassés et quand on peut se permettre la lamproie,
les violettes de mars ou les échaudés au miel. On devient un peu méthodiste, un
peu piétiste…
Ce jour-là, Fernando Colomb doit se dire qu’il
en a assez vu, qu’il est temps, non de partir, mais de vivre encore un peu dans
cette ville. Va-t-il un jour, nous sommes en juillet, saluer comme Courbet
cette mer qui lui a donné tant de choses mais lui a quand même naufragé tant de
livres ? C’est en tout cas ce que font les étudiants.
Qu’en conclure sur la librairie à Montpellier
au début du XVIe siècle ?
Peu de chose en somme.
Les points de vente du livre sont assez
nombreux. Le chiffre d’une dizaine est possible, sans doute plus si on y ajoute
les commerces où se débitent des « non livres », brochures ou gravures sur bois en feuilles
volantes , et ceux dont l’activité principale est la papèterie ou la reliure.
Chacune semble avoir sa spécialité, et donc la
clientèle qui va avec : bourgeois, universitaires, ecclésiastiques, petit
peuple… On distingue même une librairie avec une remarquable présence féminine.
Le tout est très actif, l'offre et donc la demande importantes. Les grossistes
parisiens et lyonnais fournissent des livres issus de l’Europe entière.
Paradoxalement, on peut penser que cet
éloignement des fournisseurs fait gonfler les stocks des libraires
montpelliérains. Les frais de transports, qui seront le gros problème des
libraires de Montpellier en relation avec Neuchâtel étudiés par Robert Darnton
à la veille de la Révolution, sont lourds, et il s’agit de regrouper les
commandes et de limiter les frais de port en achetant d’emblée plusieurs
exemplaires d’un même ouvrage. Le temps de transport, défavorable au
réassortiment occasionnel ou « à la demande » joue dans le même sens.
Nous sommes très loin de la gestion des stocks en « flux
tendu » : il est possible qu’une, deux, au maximum trois commandes
annuelles au même grossiste suffisent à approvisionner la boutique. Les
étagères sont donc bien remplies.
Nous ne savons pas à partir de ces sources
mettre des noms sur ces librairies.Mais nous avons pu, je crois, établir le portrait-robot de quelques unes.
Et cette différenciation à la fois des stocks et des publics cibles (c'est bien sûr lié) montre bien le dynamisme de ce commerce du livre à Montpellier. Dans un marché stagnant, une seule librairie vendrait un peu de tout. Mais la demande est telle que les librairies peuvent se spécialiser.
On pourrait comparer ce marché à celui du disque vinyl lors de son apogée à Montpellier dans les années 1980. Il y avait un disquaire classique, un disquaire pour le jazz, un autre pour la variété française, d'autres pour le rock ou pour le punk.
L'IMPRESSIONNANT MARCHE DU LIVRE A MONTPELLIER VERS 1530.
Toutes ces données vont d'ailleurs être confirmées
par les relevés de Klaus Wagner qui arrive au même résultat : Le
marché du livre à Montpellier est impressionnant, un des plus importants
du pays (Paris et Lyon exclus) à coup sûr.
A
Montpellier, donc, entre le 21 juin et le 31 juillet 1535, dates du premier et
du dernier achats, ce sont, selon Klaus WAGNER quelques 750 titres qui sont achetés.
Ce chiffre
est énorme. Même si dans le lot, plus de
la moitié sont des brochures de moins de 30 feuillets, il a dû faire le bonheur
des libraires.
En 6 mois il en achètera 1600 à Lyon, et en 3 mois, seulement 80 à Avignon. A
Montpellier, les étagères sont assez bien garnies pour lui fournir en seulement six
semaines 750 volumes.
Comment
Klaus Wagner arrive-t-il à ce chiffre de 750 alors qu’il ne subsiste à
Séville que 112 titres portant la mention de Montpellier ?
C’est que
Colomb est un méticuleux. Il rédige un
Indice General Alfabetico (Index ou catalogue général)
fort bien tenu.
Chaque livre y est sommairement décrit : auteur, titre court, date et lieu
d’impression, format.
Chaque notice porte un précieux numéro qui correspond
à l’ordre d’achat. Si on reporte les
livres encore présents dans la bibliothèque sur ce registre, puisque la
numérotation suit l’itinéraire de Colomb, on détermine les lieux d’achats des
volumes aujourd’hui disparus mais inscrits à l'Indice. Si par exemple le livre n°100 est connu comme provenant de Montpellier, et le n° 850 aussi, on sait que tous les livres entre
100 et 850 (conservés ou disparus) ont été achetés à Montpellier. La marge
d’erreur est minime, réduite à la zone floue entre le dernier dont on est sûr qu’il
vient de Montpellier et le premier livre acheté à Lyon.
Cela donne
une liste de 750 titres achetés à Montpellier dont on a une description sommaire, mais sans date précise d'achat, ni prix, et qu'il est parfois difficile d'identifier avec certitude.
C’est sur
cette liste qu’a travaillé Klaus Wagner.
Les achats montpelliérains représentent environ 5% des 15 000 volumes de la bibliothèque de Colomb. Ces 5% de part de marché du commerce européen du livre tel que le vit Fernando Colomb sont impressionnants. Ils ne correspondent sans doute pas à une réalité objective, étant soumis aux aleas de la vie et des voyages de Colomb. N'empêche, pour qu'un tel volume d'achats soit possible, il faut que les boutiques de Montpellier aient été copieusement remplies.
Rappelons
que, contrairement à Paris, Venise ou Lyon, Montpellier ne possède pas
d’imprimerie à l’époque : pourquoi produire et diffuser quand on a, venues d'ailleurs, tant de ressources sur place. Les auteurs montpelliérains se font imprimer à Lyon, d'où leurs oeuvres rayonnent dans l'Europe entière, Montpellier compris. La ville n’est pas encore la résidence de l’intendant de
la province, ni même de l’évêque, et les Etats généraux de Languedoc n’en ont
pas fait leur siège habituel. Mais Montpellier a deux atouts maîtres : son université et son commerce.
C’est donc
bien le « commerce », aussi bien intellectuel que financier, du livre
qui est étudié ici, et non sa production (exception faite de la reliure,
celle-ci étant faite sur place, les livres arrivant chez les libraires en
feuilles détachées).
Lieux d'édition :
Sur les
750 titres achetés à Montpellier, 528 portent un lieu d’édition (ou sont
suffisamment bien décrits pour que celui-ci puisse être rétabli).
Des
données fournies par Klaus Wagner, j'extrais ce qui concerne spécifiquement
Montpellier pour répondre à la question :
D’où
proviennent les livres vendus par les libraires à F. Colomb ?
36 villes
européennes sont représentées.
Grosse
surprise :
221 livres
seulement (42%) ont été imprimés en France.
Et donc
307 (58%) à l’étranger.
Relevons
sans nous attarder l’achat insolite d’un incunable sévillan.
Pour la
France, le centralisme est caricatural.
Seules 5 villes d’imprimeries se
trouvent présentes dans ce corpus. Grenoble, Poitiers et Toulouse fournissent
chacune un seul titre. Il est vrai que quelques villes, comme Rouen ou Avignon existent bien dans la Bibliothèque Colombine, puisque nous en retrouvons UN exemplaire dans les livres rescapés. Mais ces lieux d'édition sont si peu présents qu'une simple lacune dans L'Indice General les efface totalement. Quant à la vingtaine d'autres villes françaises possédant une imprimeries, elles n'apparaissent jamais. On dirait que les imprimeries de province ne diffusent que dans leur
voisinage immédiat.
Sinon,
Lyon et Paris sont strictement ex-aequo : ils fournissent 109 imprimés
chacun. Ce sont les capitales françaises de l’imprimerie et leur présence est
« normale ». Faut-il nuancer un peu l'idée
largement reçue qu'en matière de livre et d’imprimerie, Montpellier est une
succursale de Lyon? C’est sans aucun doute vrai en ce qui concerne
l’imprimerie : les universitaires montpelliérains font imprimer leurs
œuvres à Lyon. En ce qui concerne la librairie, Paris et Lyon semblent apparemment faire jeu égal. Mais apparemment seulement car nous savons que Lyon est la porte d’entrée de la
librairie italienne en France, et il est certain que c’est Lyon qui fournit à
Montpellier la plus grande partie des imprimés italiens qui s’y débitent. Mais
la source « Colombina » est incapable de nous informer sur ce circuit du livre.
En fait,
la majorité, 265 titres, soit 50,1% des livres achetés par Colomb à Montpellier
viennent d’Italie. Pour donner toute sa force à ce chiffre, rappelons que Colomb est un habitué des routes italiennes, et qu’il est parfaitement capable de se fournir lui-même sur place : il ne vient donc pas à Montpellier
pour acheter « italien », il vient pour acheter, tout court, et il
trouve des livres italiens.
Italiens,
bien sûr. Vénitiens, surtout.
Venise, à
elle seule, fournit 158 titre, 30% du total, 60% des livres
« italiens ». Presque un livre sur 3 acheté par Colomb à Montpellier
vient de Venise, avec sans doute une étape à Lyon. Montpellier, ville ouverte.
Les autres
villes italiennes ne sont pas très surprenantes : Bologne (26 titres), Florence
(18), Rome (17)…
Une ville demande plus d’explications :
Trino, qui contribue pour 12 titres.
Ilaria ANDREOLI
[11] met en lumière la forte immigration de typographes italiens, venant du Piémont et de Venise, à Lyon au début XVIe. Le « lobby piémontais », issu de la petite ville de Trino, près de Vercelli, représenté par les familles Sacon, Gabiano ou Portonari, crée un axe Venise - Trino - Lyon. Au début, il s’agit surtout d’éditer (en utilisant les imprimeurs de Lyon) des livres interdits ou des contrefaçons (par exemple des éditions du vénitien Alde), puis de « volumineux ouvrages de référence », en latin : droit, médecine, bibles destinés à la colonie italienne de Lyon, aisée et instruite, et au public européen. Le lectorat de Montpellier est naturellement une des cibles de ces éditeurs.
Les pays
allemaniques sont par contre relativement peu représentés.
Certes, comme le dit
Klaus Wagner, à Montpellier se vendent des livres « d’auteurs
impliqués dans la Réforme », mais en ce début du XVIe siècle, ce courant
ne fait que s’amorcer. Nous sommes loin du torrent de livres
« philosophiques » qui, de Neuchâtel ou Genève inondera la capitale
languedocienne dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle.
Genève ne
fournit qu’un ouvrage, comme Leipzig. L’Alsace est mieux représentée : 4
pour Strasbourg, 3 pour Haguenau. Nuremberg est présent, mais sur 4 volumes
identifiés, deux sont de vieux incunables. Les cinq ouvrages imprimés à Vienne
ont un petit air exotique.
La
Hollande, elle, n’est pas encore cette forteresse du livre qu’elle sera au
XVIIe après les Plantin et les Elzevier. Zéro pointé pour le public
montpelliérain.
41 titres
seulement, 7,7% sont originaires de ces pays du Nord et de l’Est. Nous
sommes à la limite de la marginalité.
Surtout si
on considère que Bâle, à elle seule, en fournit 15, soit 40%. On comprend mieux pourquoi les frères
Platter et tant de leurs compatriotes se retrouveront à Montpellier dès qu’ils
quitteront leur pays natal. Mais cette explication est sans doute trop facile puisque, malgré
une librairie si teintée d’Italie, les étudiants italiens ignorent superbement
l’université montpelliéraine. Il est vrai qu’ils ont Salerne, Bologne, Rome et
Florence, et surtout un air de Renaissance qui se raréfie dès qu’ils
s’aventurent au-delà des Alpes. Selon les comptages de Louis Dulieu, il n’y
aura, durant tout le 16e siècle que 75 étudiants italiens à
Montpellier.
A titre de
comparaison, on pourrait comparer ce corpus avec celui des éditions du XVIe
siècle répertoriés dans les années 1980 à la Bibliothèque municipale de
Montpellier.
Sur 2230
éditions du XVIe siècle, 705 (31%) sont françaises (dont 226 de Lyon) et 662
(30%) italiennes, dont 431 vénitiennes. Mais ce fonds, s’il comporte des fonds
anciens (ceux d’abbayes comme Aniane ou Saint-Guilhem-le-Désert et surtout la
Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon), est surtout le reflet des goûts et
préoccupations de bibliophiles du XIXe siècle et indique peu de choses sur le lectorat montpelliérain de l'époque.
En
conclusion,
on peut dire sommairement que, dans le 1er tiers du XVIe siècle :
Montpellier
est une des capitales françaises et européennes de la librairie.
Les librairies y sont nombreuses, variées voire spécialisées, et bien fournies.
Ces
librairies s’approvisionnent en priorité à Lyon, qui, outre ses propres
productions, fournit aussi les impressions italiennes.
Il existe
à Montpellier une classe « liseuse » très développée, composée
essentiellement d’universitaires (professeurs et étudiants venus de l'Europe entière) et de riches
notables, commerçants ou administrateurs, mais aussi d'une partie du "petit peuple".
L’influence de l’humanisme nordique et de la Réforme est assez limité. Il faut remarquer que la forte présence du livre à Montpellier n'est pas une des conséquences de la Réforme, puisqu'il la précède largement. Ce n'est pas la Réforme qui amène le livre à Montpellier, mais peut-être le livre qui amène la Réforme.
Cette importance du livre à Montpellier est peut-être à mettre en relation avec deux décisions de François 1er concernant Montpellier.
La première est l'édit donné à
Montpellier, le vingt-huitième jour de décembre, l'an de grâce mil cinq cens trente-sept, et de nostre règne le vingt-troisième sur le livre et la bibliothèque royale :
nous avons délibéré de faire retirer, mettre et assembler en notre librairie toutes les œuvres dignes d´être vues qui ont été et seront faites, compilées, amplifiées, corrigées et amendées de notre temps... et ceci aussi bien pour les livres imprimés en France que pour les livres imprimés hors de notre dit royaume, de quelque qualité ou discipline qu'il soit
Chaque imprimé devra donc être présenté à Melin de Saint-Gelais qui, si bon lui semble, en achètera pour nous au prix des autres [acheteurs].
Il ne s'agit donc pas, comme on l'a dit trop souvent, de créer un "dépôt légal", mais bel et bien de contrôler les parutions et de fonder une bibliothèque qui se pense alors universelle dans ses origines et son contenu.
Cette idée de bibliothèque universelle, énoncée par François 1er à Montpellier en 1537, Fernando Colomb, à Montpellier en 1535 avait essayé de la mettre en pratique.
La seconde décision du roi, début 1539, concerne Guillaume Pellicier, l'évêque de Montpellier qu'il nomme ambassadeur à Venise. Avec une mission spéciale : trouver des manuscrits, grecs principalement, et les acheter ou en faire de bonnes copies. Il en ramassera, pour lui et pour le roi, des centaines. Encore un montpelliérain de ce premier XVIe siècle englouti dans un océan de livres...
Sa bibliothèque sera pillée, mais c'est une autre (ou la même) histoire.
LISTE DES LIVRES ACHETÉS À MONTPELLIER EXTRAITE DU CATALOGUE INFORMATISÉ DE LA BIBLIOTHECA COLOMBINA :
6 Alexander de Villedieu (O.F.M.)
Doctrinale
Alexandri / cum glosa Ladauiani. (1497)
Editorial: [Lugduni : Petrus Mareschal et Barnabas Chaussard, n.d. 1497]
Descripción física: [442] h. ; 4º (26 cm)
Autores: Lavadianus, Johannes, com. ; Chaussard,
Barnabas, imp. ; Mareschal, Pierre, imp.
Títulos Uniformes: Doctrinale pro eruditione puerorum.
Cantiuncula,
Claudius.
24 Comines, Philippe de.
Cronique
et hystoire / faicte [et] composee par seu messire Philippe de Co[m]mines
chevalier et seigneur Dargenton ; contenant les choses aduenues durant le regne
du roy Loys unziesme, tant en France, Bourgo[n]gne, Flandres, Arthois,
Angleterre que Espaigne et lieux circonuoisins. (1525)
Edición: Nouuellement reueue et corrigee Auec plussieurs notables mis au
marge.
Editorial: Paris : pour Galliot du pre, 1525 (par Anthoine couteau)
Descripción física: [4], CVI h. ; Fol. (27 cm)
Autores: Couteau, Antoine, imp. ; Du Pré, Galliot I, ed.
Títulos Uniformes: Mémoires.
27 La couronne Notre-Dame.
La
couronne nostre dame. (1529)
Editorial: [Lyon : Claude Nourry, Claudine Carcan o Pierre de Sainte-Lucie,
entre mayo 1529 y verano 1535]
Descripción física: [24] h. ; 8º (14 cm)
Autores: Nourry, Claude, imp. ; Carcan, Claudine,
imp. ; Sainte-Lucie, Pierre de, imp.
33 L'erreur et abus des méchants usuriers.
Lerreur
et abuz des meschans vsuriers. (1527)
Editorial: [Lyon : maison Chaussard, ca. 1527]
Descripción física: [4] h. ; 8 (16 cm)
Entidades: Maison Chaussard.
Títulos Uniformes: L'erreur et abus des méchants usuriers.
35 Florent et Lyon.
Florent
et Lyon. (1532)
Editorial: Imprime a Lyon : par Oliuier Arnoullet..., 1532.
Descripción física: [32] h. : il. ; 4º (21 cm)
Autores: Arnoullet, Olivier, imp.
38 Froissart, Jean.
Le
premier [-quart] volume de messire Iehan Froissart lequel traicte des choses
Dignes de memoire aduenues tantes pays de France, Angleterre, Flandres,
Espaigne que Escoce et autres lieux circonuoisins. (1530)
Edición: Nouuellement oultre les precedentes impressio[n]s Imprime a
Paris.
Editorial: [Paris] : en la bouctique de Poncet le preux : Iehan Petit,
1530 (par Anthoine cousteau imprimeur)
Descripción física: 4 partes ; Fol. (33 cm)
Autores: Couteau, Antoine, imp. ; Petit, Jean,
ed. ; Le Preux, Poncet, ed.
43 Guido de Cauliaco.
Le
Guido[n] en fra[n]çoys : nouuelleme[n]t imprime / auec les gloses de... Iehan
falcon... ; et aussi les additions de maistre Simphorien Cha[m]pier, auec les
additions de maistre Anthoine romeri. (1534)
Editorial: Imprime a Paris : [Denis Janot : Antoine de la Barre :
Guillaume le Bret], 1534.
Descripción física: [10], CCCXXIIII h. ; Fol. (27 cm)
Autores: Falcon, Jean, com. ; Champier, Symphorien,
com. ; Romeri, Anthoine, adic. ; Janot, Denis, imp. ; La
Barre, Antoine de, imp. ; Le Bret, Guillaume, imp.
48 Le jardin de paradis.
Le
iardin de paradis. (1501)
Editorial: Imprime a Lyon : par Barnabe Chaussard, [d. 1516]
Descripción física: [16] h. ; 8º (15 cm)
Autores: Chaussard, Barnabas, imp.
Títulos Uniformes: Le jardin de paradis.
57 Le livre de paix en Jésus-Christ.
Le
liure de paix en Iesucrist. (1532)
Editorial: [A Lyon imprime] : Barnabe Chaussard, 1532.
Descripción física: [20] h. ; 8º (18 cm)
Autores: Chaussard, Barnabas, imp.
Títulos Uniformes: Le livre de paix en Jésus-Christ.
59 Le livre de vraie et parfaite oraison.
Le
livre de vraye [et] parfaicte oraison. (1529)
Editorial: Imprime a Paris : par maistre Simon du bois : pour
Christie[n] Vvechel libraire, 1529.
Descripción física: [10], CLII h. ; 8º (15 cm)
Autores: Wechel, Chrétien, ed. ; Du Bois, Simon, imp.
Títulos Uniformes: Le livre de vraie et parfaite oraison.
69 Ovidio Nasón, Publio.
La
bible des Poetes de Ouide Methamorphose / Translate de latin en
Fra[n]coys. (1531)
Edición: Nouuellement Imprimee a Paris.
Editorial: [Paris] : On les vend en la rue sainct Iacques par Iehan
Petit.... Et p[ar] Philippe le Noir Lung des deux relieurs de liures iurez en
luniuersite de Paris, 1531 (Imprime pour Iehan Petit...)
Descripción física: [18], CLXXI, [5] h. : il. ; Fol. (28 cm)
Autores: Petit, Jean, ed. ; Le Noir, Philippe, ed.
Títulos Uniformes: Metamorphoses. Francés.
74 Pepin, Guillaume (O.P.)
Expositio
in Genesim iuxta quodruplice[m] sacre scripture sensum, literalem scilicet,
moralem, allegoricum, [et] anagogicum / auctore fratre Guillelmo Pepino...
ordinis predicatorum. (1528)
Editorial: Parisijs : Apud Ioa[n]nem Paruum..., 1528 (in edib[us]
Claudij Cheuallonij)
Descripción física: 2 partes ; 8º (17 cm)
Autores: Petit, Jean, ed. ; Chevallon, Claude, imp.
79 Le protocole des notaires.
Le
Prothocole des Notaires, Tabellio[n]s Greffiers, Sergens [et] autres
practiciens de court laye : contenant la maniere de rediger par escrip tous
contractz, instrume[n]s, partaiges, inue[n]taires, co[m]ptes, co[m]missions,
rappors, dema[n]des [et] autres actes et exploictz de iustice. (1531)
Editorial: Nouuellement Imprime a Lyon : [Germain Rose], 1531.
Descripción física: CXXXI, [5] h. ; 8º (14 cm)
Autores: Rose, Germain, imp.
Títulos Uniformes: Le protocole des notaires.
80 Quadragésimal.
Le
quadragesimal spirituel Cestassauoir la salade, les febues frites, les pois
passez, la puree, la lamproye, le safren, les orenges, la violette de Mars, les
pruneaulx, les figues, les amandes, le miel, le pain, les eschauldez... Puis en
fin le double des lettres du sainct esprit enuoiees aux dames de Paris,
veufues, ieunes, religieuses, filles et pucelles, touchant les voiaiges de
pasques Cestassauoir sainct saulueur, argenteil, nostre dame des vertus, et
montmartre : La salade de Karesme. (1501)
Editorial: Nouuellement Imprime a Paris : par Alain lotrian..., [a.
julio 1535]
Descripción física: [22] h. ; 4º (20 cm)
Autores: Lotrian, Alain, imp.
Títulos Uniformes: Quadragésimal.
92 Le songe de la pucelle.
Le
songe de la pucelle. (1528)
Editorial: [Lyon : maison Chaussard, ca. 1528]
Descripción física: [8] h. ; 8º (14 cm)
Entidades: Maison Chaussard.
Títulos Uniformes: Le songe de la pucelle.
95 Thibault, Jean.
Le
tresor du remede de preseruatif, [et] guerison (bien experimentee) de la peste,
[et] Fieure pestilentiale : auec declaration do[n]t procedent les gouttes
naturelles, [et] co[m]me elles doibue[n]t retourner, et aussi aulcunes
allegations [et] receptes sus le mal caduque, pleuresies [et] Apoplexies, et ce
quil appartie[n]t scauoir a vng parfaict Medecin, [et]c. / Co[m]pose par maistre
Iehan Thibault. (1532)
Editorial: Paris : Iehan bignon, 1532.
Descripción física: [16] h. ; 4º (20 cm)
Autores: Bignon, Jean, imp.
101 Les ventes d'amours.
Les
ventes damours. (1529)
Editorial: [Lyon : Claude Nourry, Claudine Carcan o Pierre de
Sainte-Lucie, entre mayo 1529 y julio 1535]
Descripción física: [8] h. ; 8º (14 cm)
Autores: Nourry, Claude, imp. ; Carcan, Claudine,
imp. ; Sainte-Lucie, Pierre de, imp.
Títulos Uniformes: Les ventes d'amours.
102 La vie de Sainte Madeleine.
La
vie de la Magdaleine. (1501)
Editorial: Imprine [sic] a Lyon : par Barnabe chaussard, [a. julio 1535]
Descripción física: [8] h. ; 8º (15 cm)
Títulos Uniformes: La vie de Sainte Madeleine.
104 La vie de Sainte Catherine.
La
vie de Sai[n]cte Katherine. (1530)
Editorial: [Lyon : Jacques Moderne, ca. 1530]
Descripción física: [8] h. ; 8º (14 cm)
Autores: Moderne, Jacques, imp.
Títulos Uniformes: La vie de Sainte Catherine.
106 La vie de Saint Sébastien.
La
vie de sainct Sebastien. (1516)
Editorial: A lyo[n] imprimee : cheuz Barnabe chaussard, [ca. 1516-1527]
Descripción física: [8] h. ; 8º (15 cm)
Autores: Chaussard, Barnabas, imp.
Títulos Uniformes: La vie de Saint Sébastien.
110 La vie de Sainte Marguerite.
La
vie Saincte Marguerite. (1501)
Editorial: Imprimee a Lyo[n] : par Pierre de Saincte Lucie, [a. julio
1535]
Descripción física: [16] h. ; 8º (14 cm)
Autores: Sainte-Lucie, Pierre de, imp.
Títulos Uniformes: La vie de Sainte Marguerite.
112 Virgilio Marón, Publio.
Les
oeuures de virgille / Translatees de latin en françoys, et nouuelleme[n]t
imprimees a Paris. (1529)
Editorial: On les vend a Paris... : en la boutique de Galliot du
pre...,1529 (Imprimees... par Nicolas couteau...)
Descripción física: [2], CCXXXII h. ; Fol. (29 cm)
Autores: Saint-Gelais, Octavien de, Obispo de Angoulême,
trad. ; Michel, Guillaume, trad. ; Couteau, Nicolas,
imp. ; Du Pré, Galliot I, ed.
Títulos Uniformes: Opera. Francés. ; Bucolica.
Francés. ; Georgica. Francés. ; Aeneis. Francés.

